Démarrer une moto anglaise classique au kick est bien plus qu’une simple procédure mécanique. C’est une danse, un rituel qui crée une connexion unique entre le pilote et sa machine. Pour beaucoup, l’image du motard se battant avec son kick est une source d’appréhension.
Pourtant, démarrer une Triumph TR6 n’a rien de sorcier. Il s’agit d’une technique qui s’apprend, d’une séquence de gestes précis qui, une fois maîtrisés, transforment l’anxiété en une immense satisfaction.
Vous venez d’acquérir une magnifique TR6 ou vous hésitez à sauter le pas à cause de cette réputation ? Oubliez les idées reçues. Nous allons voir ensemble, pas à pas, comment apprivoiser ce démarrage et faire chanter le bicylindre avec confiance et sans vous faire mal.
Avant le premier coup de kick : les vérifications préalables
Avant même de poser le pied sur le kick, un bon démarrage commence par quelques vérifications simples. Pensez-y comme à la check-list d’un pilote avant le décollage. Cela prend dix secondes et peut vous éviter bien des efforts inutiles.
Les indispensables à ne jamais oublier
Assurez-vous que tout est en ordre pour que le moteur puisse s’éveiller.
- Ouvrez le robinet d’essence, en position « ON » ou « RES » si votre réservoir est bas.
- Vérifiez que le coupe-circuit, généralement situé sur le comodo droit, est bien en position de marche.
- Mettez la boîte de vitesses au point mort ; le voyant vert est votre ami.
- Tournez la clé pour mettre le contact. Le tableau de bord s’illumine légèrement, la bête est prête à être réveillée.
Le rituel du démarrage à froid : votre processus détaillé
C’est le moment qui impressionne le plus. Un moteur froid a besoin d’un mélange air-essence plus riche pour démarrer. C’est tout l’objet de cette procédure.
Suivez ces étapes dans l’ordre et avec calme, le succès est au bout du chemin.
Étape 1 : Préparer les carburateurs
Sur les carburateurs Amal d’origine, vous trouverez un petit piston sur le dessus, appelé « tickler« . Son rôle est d’enrichir le mélange en faisant déborder un peu d’essence la cuve. C’est l’équivalent du starter sur une moto moderne.
Appuyez sur chaque tickler pendant 2 à 3 secondes, jusqu’à sentir un peu d’essence sur votre doigt ou la voir suinter légèrement. C’est le signe que le circuit est prêt. Attention, n’insistez pas trop longtemps au risque de noyer le moteur.
Étape 2 : Localiser le point de compression (le fameux PMH)
C’est l’étape la plus importante. Ne touchez surtout pas à la poignée de gaz ! Gardez-la fermée.
Dépliez le kick et poussez-le doucement vers le bas avec votre pied. Vous allez sentir des phases « molles » et une phase où la résistance augmente très nettement. Ce point dur, c’est le Point Mort Haut (PMH) de compression.
C’est le moment où le piston est en haut, prêt à recevoir l’impulsion décisive. Vous l’avez trouvé ? Parfait.
Étape 3 : Le coup de kick, un geste ample et résolu
Une fois le point dur localisé, laissez le kick remonter complètement en haut de sa course. Prenez une bonne position, stable sur votre autre pied. Maintenant, donnez un coup de kick ample, continu et franc, en poussant sur toute la longueur de sa course, jusqu’en bas.
Il ne s’agit pas de sauter dessus violemment, mais de l’accompagner avec le poids de votre corps dans un mouvement fluide. Si tout est bien réglé, le bicylindre s’ébrouera dans son grondement caractéristique.
Les situations fréquentes et leurs solutions
Même avec la meilleure méthode, il arrive que les choses ne se passent pas comme prévu. Pas de panique, à chaque problème sa solution simple.
Le démarrage à chaud, une procédure simplifiée
Une fois que la moto a tourné et que le moteur est chaud, la procédure est beaucoup plus facile. Inutile de préparer les carburateurs, le moteur n’en a plus besoin. En général, il suffit de trouver le point de compression et de donner un coup de kick.
Parfois, un minuscule filet de gaz (à peine 1/8e de tour de poignée) peut aider, mais souvent, elle démarrera sans même y toucher.
Au secours, le moteur est noyé !
Vous avez trop « chatouillé » ou mis des coups de gaz à froid ? Une forte odeur d’essence se dégage et la moto refuse de démarrer.
C’est le signe classique d’un moteur noyé. La solution est simple :
- Coupez le contact.
- Fermez le robinet d’essence.
- Ouvrez la poignée de gaz en grand pour laisser entrer un maximum d’air.
- Donnez ensuite 5 à 6 coups de kick pour évacuer l’excès d’essence et aérer les cylindres.
- Attendez une minute.
- Reprenez la procédure de démarrage normale, sans chatouiller cette fois.
Sécurité avant tout : éviter le retour de kick
La plus grande peur associée au kick est le fameux « retour« , ce moment où le moteur « pète » en arrière et renvoie le kick violemment vers le haut. Cela peut être douloureux. Heureusement, on peut l’éviter.
Un allumage bien réglé (notamment les versions électroniques comme Boyer ou Pazon) minimise grandement ce risque.
La meilleure prévention reste votre technique. Portez toujours des chaussures solides qui protègent la cheville et offrent une bonne semelle. Surtout, appliquez-vous à bien pousser le kick sur toute sa course, jusqu’en bas.
Un retour de kick est plus violent si votre pied n’est qu’à mi-course. En l’accompagnant jusqu’au bout, votre jambe est déjà en extension et absorbe bien mieux l’éventuel choc.
Vous l’aurez compris, démarrer une Triumph TR6 au kick est moins une question de force que de méthode et de finesse. En respectant le rituel du démarrage à froid, en apprenant à « sentir » votre moteur trouver son point de compression et en appliquant le geste juste, vous transformerez cette épreuve en un véritable plaisir.
La satisfaction d’entendre le moteur prendre vie grâce à votre propre impulsion est incomparable. C’est le premier dialogue que vous établissez avec votre machine avant chaque balade. Alors, n’ayez plus peur, entraînez-vous, et savourez ce lien authentique qui unit l’homme à la mécanique.
Et vous, quelles sont vos astuces personnelles pour démarrer votre belle Anglaise ? Partagez votre expérience dans les commentaires.
